
1. Contexte et justification
” Ce plaidoyer s’adresse principalement à ces Messieurs du Ministère des Finances, du Trésor Public et de l’Union Algérienne des Sociétés d’Assurance et de Réassurance (UAR)“.
Dans un monde de plus en plus ouvert et mobile, des milliers d’Algériens se rendent chaque année à l’étranger — en Tunisie, en Jordanie, en Turquie ou en France — pour recevoir des soins médicaux que le système national peine encore à offrir. Ces déplacements, souvent financés sur fonds personnels et hors de tout cadre réglementaire, traduisent un besoin réel et non couvert d’accès à des soins de qualité, ainsi qu’une carence de solutions d’assurance santé adaptées.
Aujourd’hui, les produits disponibles sur le marché algérien se limitent essentiellement aux assurances voyage et assistance de courte durée, sans équivalent des couvertures internationales proposées par des acteurs tels que BUPA, Allianz Care, Cigna Global ou AXA Health. Cette situation prive les citoyens d’un outil de protection essentiel et expose de nombreuses familles à une fragilité financière extrême lorsqu’une maladie grave survient.
2. Proposition de mécanisme
Nous plaidons pour que les compagnies d’assurance opérant en Algérie — seules ou en partenariat avec des assureurs internationaux agréés — puissent proposer des produits d’assurance santé internationale sous les conditions suivantes :
1. Souscription en dinars algériens, afin de respecter le cadre monétaire national ;
2. Paiement des soins à l’étranger directement par l’assureur partenaire, sans transfert de fonds de la part de l’assuré ;
3. Remboursement exclusif en Algérie, sur un compte en dinars ou en devises, sans virement direct vers l’étranger ;
4. Supervision du mécanisme par le Trésor Public et l’UAR, via un compte technique en devises destiné à équilibrer les flux financiers ;
5. Reporting trimestriel transparent des sorties et entrées de devises liées à ces opérations.
3. Impact macroéconomique et social attendu
Le dispositif proposé ne constitue pas une fuite de devises, mais un mécanisme compensé :
– Les primes payées en dinars renforcent la trésorerie locale ;
– Les remboursements se font sur le territoire national ;
– Les dépenses médicales à l’étranger sont mieux tracées et prévisibles.
Exemple simple : 10 000 assurés payant chacun une prime annuelle de 500 000 DZD = 5 milliards DZD de cotisations locales. Même avec une sinistralité de 40 %, le coût en devises serait inférieur aux évacuations actuelles prises en charge par la CNAS, tout en améliorant la couverture santé des citoyens.
4. Alignement avec les politiques publiques
• Allègement partiel de la charge de la CNAS pour les soins à l’étranger ;
• Complémentarité public/privé dans la réforme du système de santé ;
• Modernisation du secteur des assurances, en cohérence avec la stratégie nationale de digitalisation et de transparence ;
• Compatibilité avec le modèle Takaful, pour des produits conformes aux valeurs culturelles et religieuses.
5. Réponses aux objections prévisibles
Risque de fuite de devises : Les flux sont contrôlés et compensés en dinars ; supervision conjointe Trésor–UAR ; reporting trimestriel.
Inégalité d’accès : Produits modulaires adaptés à différents niveaux de revenus ; complémentarité avec le système public.
Complexité de gestion : Partenariats avec des assureurs expérimentés ; cadre réglementaire clair et supervision financière.
Impact sur la CNAS : Allègement des charges de soins à l’étranger ; optimisation de la dépense publique.
6. Recommandations
1. Constitution d’un groupe de travail réunissant le Ministère des Finances, le Trésor, l’UAR, la CNAS et la Banque d’Algérie pour cadrer le dispositif.
2. Phase pilote de 12 mois avec un ou deux opérateurs agréés.
3. Intégration du cadre juridique dans la prochaine Loi de Finances complémentaire ou via amendement du Code des Assurances.
4. Mise en place d’un portail digital de suivi pour garantir la transparence et la traçabilité des opérations.
7. Conclusion
L’ouverture encadrée des assurances santé internationales ne menace ni la souveraineté économique ni l’équilibre des comptes extérieurs. Elle représente au contraire un acte de confiance envers les citoyens, un outil de modernisation du secteur financier, et un levier concret de justice sociale et de santé publique.
Permettre à chaque Algérien de souscrire, en dinars, à une couverture santé internationale, c’est investir dans le bien-être, la dignité et la stabilité sociale. C’est aussi reconnaître que la santé n’est pas une dépense : c’est un capital national.